- SYNCHROTRON (RAYONNEMENT)
- SYNCHROTRON (RAYONNEMENT)Toute particule chargée soumise à une accélération émet des ondes électromagnétiques. Cet effet est à la base des communications «sans fil», puisque les ondes sont émises par des électrons qui oscillent le long des antennes. Les propriétés de cette émission se calculent exactement avec les équations de l’électrodynamique classique pour une antenne, relativiste pour une charge se déplaçant à très grande vitesse. Elles montrent que les propriétés géométriques et spatiales de la lumière émise (photons) ne dépendent que de l’énergie de la particule, de sa masse et du champ d’accélération dans lequel elle se déplace. Seules des particules légères, c’est-à-dire des électrons ou leurs antiparticules (positons), peuvent subir des accélérations suffisantes.Deux configurations sont particulièrement intéressantes: l’accélération centripète réalisée dans les accélérateurs circulaires d’électrons (synchrotrons et anneaux de stockage) et dans les galaxies où des électrons très rapides soumis au champ magnétique de cet objet stellaire décrivent des trajectoires circulaires (cf. GALAXIES, RADARASTRONOMIE, RADIOASTRONOMIE), et l’accélération périodique transverse dans des structures magnétiques appelées ondulateurs.Ce rayonnement ainsi émis s’appelle rayonnement de freinage magnétique ou encore rayonnement synchrotron. Il a été observé pour la première fois en avril 1947 par l’équipe de J. Blewett sur le bêtatron de 100 millions d’électronvolts de la General Electric (cf. accélérateurs de PARTICULES).Caractéristiques du rayonnement synchrotronUne particule chargée soumise à une accélération émet un rayonnement «utile» lorsque sa vitesse s’approche de celle de la lumière. En effet, dans ce cas la divergence verticale de ce faisceau est très faible 年 梁 1/ 塚 , où 塚 = E /m 0c 2, E étant l’énergie de l’électron et m 0c 2 = 0,511 MeV, son énergie au repos (MeV: million d’électronvolts). Celle-ci est due au caractère relativiste de l’électron.Accélération centripèteCe sera le cas des anneaux de stockage construits au début des années 1950 pour la physique des hautes énergies. Chaque fois qu’un électron va passer dans un aimant dipolaire, il émettra de la lumière. Cette émission est très fortement polarisée suivant une direction parallèle au vecteur d’accélération, et elle présente une répartition spectrale continue. Les longueurs d’onde sont d’autant plus courtes et le nombre de photons d’autant plus grand que l’énergie des électrons est plus élevée et le rayon de courbure de la trajectoire plus petit. En pratique, si l’on est intéressé par un rayonnement dans le domaine ultraviolet ou des rayons X mous, on choisira l’énergie d’électrons au voisinage de 1,5 GeV; pour les rayons X durs, il faudra monter l’énergie jusqu’à 6 GeV. Enfin, dans ces anneaux, les électrons étant regroupés en paquets (de quelques millimètres à quelques centimètres), l’émission sera pulsée, la durée de l’impulsion variant entre 0,05 et 2 nanosecondes (10–9 s).Accélération périodique transverse: les «ondulateurs»Les ondulateurs sont des structures magnétiques (de quelques mètres de longueur) présentant un champ magnétique périodique (par exemple sinusoïdal) et que l’on installe sur les sections droites des anneaux de stockage. L’électron aura, dans le plan perpendiculaire, une trajectoire sinusoïdale. Dans le cas particulier où l’angle de déflexion maximal est beaucoup plus petit que 1/ 塚 , la lumière est émise dans un cône d’ouverture 梁 1/ 塚 centré sur l’axe de la trajectoire moyenne. Au lieu d’avoir un spectre continu, on obtient une série de raies dont on peut aisément changer l’énergie avec le champ magnétique. En plus d’une faible divergence, les ondulateurs permettent de gagner un facteur de 104 en brillance. Cela explique pourquoi, sur les anneaux de stockage construits pour l’exploitation du rayonnement synchrotron, ils sont devenus des sources inégalables. On peut par ailleurs construire des ondulateurs d’un type particulier permettant d’obtenir de la lumière circulairement polarisée.Les anneaux de stockage d’électrons: sources exceptionnelles de rayonnement synchrotronLes physiciens des particules élémentaires ont fabriqué, au début des années 1960, des accélérateurs circulaires pour réaliser des collisions entre électrons et positons (cf. accélérateurs de PARTICULES). Lorsqu’un électron passe dans un aimant dipolaire ou un ondulateur, il émet un rayonnement; il suffit d’installer une ligne de lumière (sous vide) pour pouvoir extraire un faisceau. Dans les années 1960-1970, des lignes ont été installées «en parasite» sur des anneaux construits pour la physique des hautes énergies et ont servi à montrer l’énorme potentiel du rayonnement en biologie, en chimie, en physique des matériaux ainsi que dans des domaines appliqués (lithographie, imagerie, etc.). On les appellera les sources de la première génération. Dans les années 1970-1980, des anneaux conçus uniquement pour l’exploitation du rayonnement synchrotron ont été construits: on y trouvait peu ou pas d’ondulateurs (deuxième génération).Au début des années 1990, on construit la troisième génération; il s’agit de machines équipées essentiellement d’ondulateurs, ayant des faisceaux d’électrons de très petites dimensions (0,1 憐 0,2 mm2), extrêmement stables (quelques 猪m). Ces sources ont des brillances exceptionnelles par rapport à des tubes à rayons X ou aux sources synchrotrons de première et de deuxième génération. Les puissances émises par les ondulateurs peuvent atteindre quelques kilowatts.Dans le monde, environ quarante-cinq centres de rayonnement synchrotron sont soit en exploitation, soit en cours de construction. Il faut rappeler que le rayonnement synchrotron peut être utilisé depuis l’infrarouge lointain jusqu’aux rayons X durs sur une même machine.L’application du rayonnement synchrotronPendant longtemps, le domaine des rayons X a été caractérisé par des sources peu brillantes (tubes à rayons X) et par une optique peu performante puisque les rayons X n’étant pas refractés par les matériaux, il n’était pas possible de faire des lentilles comme dans le visible. Nous avons déjà vu que les ondulateurs présentaient des gains en brillance de l’ordre de 1010 par rapport au tube à rayons X. En outre, des lentilles de Fresnel dans le domaine des rayons X mous nous permettent de focaliser sur un diamètre de 30 nanomètres et des zones de Bragg-Fresnel dans la région 5-50 kiloélectronvolts sur moins de 1 micromètre.En 1993, il a été montré à l’E.S.R.F. (European Synchrotron Radiation Facility) de Grenoble que la lumière émise par un ondulateur, après monochromatisation et passage à travers un trou de 4 micromètres, est parfaitement cohérente. Cela veut dire que des expériences faites dans le visible avec des lasers deviennent possibles à 10 kiloélectronvolts.Utilisation en physiqueCe rayonnement donne une impulsion nouvelle à l’étude de phénomènes fondamentaux: étude des électrons des couches atomiques profondes et de leurs corrélations dans les atomes, détermination directe de la structure de bandes des solides (cf. physique des SOLIDES), détermination de la bande interdite (gap) dans les supraconducteurs à haute température, des propriétés électroniques des surfaces ou des liaisons chimiques d’absorbats, étude des molécules simples n’absorbant que dans l’ultraviolet lointain et de leur évolution photochimique (dissociation, ionisation, recombinaison directe). Ces études font appel à des méthodes spectroscopiques diverses, adaptées à ces longueurs d’onde: absorption, réflectivité, fluorescence, analyse énergétique et analyse des photoélectrons et des photons ions, ou encore diffraction, diffusion inélastique et diffusion Compton dans le domaine des rayons X.La pression qui règne au centre de la Terre ou dans les planètes géantes est de l’ordre de 300 ou 400 gigapascals. On sait aujourd’hui reproduire ces pressions en laboratoire grâce aux enclumes en diamant. Mais l’obtention de pressions aussi élevées ne peut s’obtenir que sur des volumes très petits (de quelques micromètres cubes). Il est donc nécessaire d’avoir une source très brillante et la possibilité de focaliser les rayons X sur quelques micromètres carrés! Cela devrait permettre, dans un proche avenir, d’étudier sous très haute pression un des éléments les plus intéressants du tableau périodique, l’hydrogène. Des modèles théoriques montrent en effet que, vers 250 gigapascals, ce solide moléculaire devrait devenir métallique et supraconducteur à 260 kelvins.Pendant longtemps, l’étude du magnétisme a été l’apanage des neutrons: cela est en train de changer grâce à la photoémission angulaire résolue en spin qui permet d’obtenir la structure de bandes des électrons majoritaires et minoritaires, à la diffraction magnétique résonante et au dichroïsme sur les niveaux de cœur.De nombreuses techniques nouvelles ont vu le jour: la diffraction de surface (sous incidence rasante), qui permet d’étudier la reconstruction des surfaces et les interfaces, la diffraction magnétique (trop faible pour être détectée avec des tubes à rayons X), le dichroïsme sur les niveaux de cœur, qui permet de mesurer directement la partie orbitale et de spin du moment magnétique de matériaux, la microscopie à rayons X avec une résolution de 30 nanomètres, la diffraction nucléaire.Utilisation en chimieL’analyse chimique par fluorescence X excitée par le rayonnement synchrotron est actuellement la méthode la plus sensible pour déterminer des traces d’éléments. Le spectre d’absorption X d’un élément en phase condensée présente un seuil brutal à une longueur d’onde s, puis des oscillations lorsque 麗 s: ces oscillations proviennent des interférences entre les ondes associées à l’électron excité, l’onde sphérique issue de l’élément considéré et les ondes réfléchies par les atomes voisins. Il est possible d’extraire des informations structurales à partir de ces oscillations: nombre d’atomes voisins et distance par rapport à l’atome excité. De plus, cette nouvelle méthode d’analyse appelée EXAFS (extended X-ray absorption fine structure ) permet de signer l’élément choisi puisque la longueur d’onde du seuil s, qui correspond à une excitation d’un électron à partir d’une couche K ou L, est caractéristique du numéro atomique Z de l’élément. Cette méthode, qui peut aussi s’appliquer aux surfaces, a connu un grand développement, car elle peut être appliquée aux liquides, aux solides amorphes ou cristallins et donne des renseignements complémentaires avec ceux qui sont obtenus en diffraction ou en diffusion. Elle permet de plus des mesures cinétiques à l’échelle de la milliseconde, ce qui est important pour l’étude des systèmes en évolution, changement de phase, déformation de matériaux, déplacement de parois de domaine magnétique, évolution de polymères non stabilisés, catalyseurs.Utilisation en biologie et en médecineLe rayonnement synchrotron est de plus en plus utilisé dans l’étude des matériaux biologiques. Sa grande intensité permet de déterminer la structure tridimensionnelle de protéines et de virus de très grandes tailles (face=F0019 黎 100 nm) par diffraction de rayons X. Or il existe une relation entre cette structure et la fonction biologique. Il permet aussi d’étudier l’évolution dans le temps de changements dans les structures (contraction musculaire par exemple). Des clichés de Laue (diffraction en faisceau blanc) sur des petites protéines ont pu être enregistrés en 50 picosecondes (10–12 s).Des expériences de tomographie et d’angiographie à longueur d’onde variable ont donné des résultats intéressants sur des patients. Toutefois, ces techniques n’en sont pour l’instant qu’à un stade de recherche.L’étude spectroscopique résolue dans le temps de chromophores (molécules fluorescentes) naturels ou judicieusement fixés par les biochimistes dans des échantillons donne des informations sur leur environnement (par exemple, la durée radioactive des molécules de tryptophane le long de la chaîne protéique dans l’hémoglobine varie avec la concentration en oxygène et fournit des informations sur le mécanisme de fixation de celui-ci).Enfin, les microscopes à rayons X mous donnent des images de cellules vivantes (contrairement au microscope à électrons) avec des résolutions de 30 nanomètres et avec d’excellents contrastes.Lithographie-microfabricationAu milieu des années 1990, dans le processus de fabrication des circuits intégrés, la lithographie ultraviolette permet d’obtenir des résolutions de l’ordre de 0,5 猪m. Lorsqu’il faudra passer au-dessous de 0,2 猪m, la seule technique envisageable est la lithographie par rayons X. Plusieurs anneaux ont été construits aux États-Unis et au Japon pour des compagnies fabriquant des circuits intégrés. Cette technique permet aussi de réaliser des capteurs et des moteurs de très faibles dimensions (de quelques dizaines de 猪m).
Encyclopédie Universelle. 2012.